Mémoires de guerre : rencontre avec Staline, « Le rang », Le Salut, pages 77-79
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Problématique : comment le mémorialiste aborde-t-il cette rencontre primordiale, quel portrait dresse-t-il de Staline ? Dans quelle mesure, l’écrivain offre-t-il un point de vue personnel et une coloration romanesque à cette rencontre entre chefs d’État ?
Texte : « Nous séjournâmes huit jours … crayonnait des hiéroglyphes ».
Axe de lecture : Des mémoires au roman autobiographique : un portrait fascinant par un écrivain de l’histoire fasciné.
Doc. 1 : Portrait de Staline |
Cet effet est transcrit, page 77, avec les moyens grammaticaux et lexicaux du romancier :
- Le mémorialiste restitue le temps de latence en multipliant les compléments circonstanciels de durée « huit jours-pendant ce temps-longtemps » qui créent un effet d’attente impatiente. Il y a volonté de gérer le moment précis de la rencontre, en différant et maîtrisant les circonstances de l’entretien.
- Le moment des négociations est différé, parce que Staline est l’absent alors que le chef d’État français est englobé dans un pronom pluriel de la première personne « nous », ou de manière métonymique avec le déterminant possessif « notre mission militaire » (il s'agit d'une figure de style qui consiste à montrer une partie d'un tout au lieu de ce tout). L’absence de Staline crée une tension dramatique mettant en valeur son apparition à la page suivante. D’un côté l’absence orchestrée du despote, de l’autre la multiplication des entretiens rendue par une accumulation des synonymes du mot « discussion » : « idées-informations-suggestions-entretiens » jalonnés de verbes de paroles « échanger-parler-converser-dire ».
- Le futur proche (« ce qui allait être dit et fait ») annonce l’imminence de la rencontre et surtout son report puisque ces négociations ne sont pas l’ « essentiel ». Le conditionnel « serait » ne manque pas de suggérer l’irréel du présent, l’irréel de la rencontre, ce qui contribue à cet effet de suspension du temps.
• la mise en scène solennelle de la rencontre,
Cette mise en scène, page 79, est orchestrée par les russes :
- La solennité de la transcription de la date mentionnant la première rencontre (topos de la littérature) et la précision spatio temporelle suggèrent que l’invitation est faite par les russes, imposée aux français. (Exemple : dans la tournure « un ascenseur porta les français jusqu’à l’entrée… », le pronom COD, complément du verbe « porter » dénue les français de toute initiative.)
- De même, la progression dans le Kremlin ressemble à une progression labyrinthique, comme le traduit la syntaxe de la longue phrase regorgeant de compléments du nom et relatives « l’entrée d’un long corridor …que jalonnaient… et au bout duquel… ». L’arrivée dans la grande pièce éclairée semble être le cœur d’une bâtisse, le lieu solennel de la négociation.
- La présence des policiers dont le nombre « imposant » est mentionné, leur immobilisme sous entendu par le verbe « jalonner », l’introduction cérémoniale de Molotov manquent de naturel et instaurent la froideur de l'accueil.
L’effet d’attente est voulu par le diplomate, restitué par l’écrivain, d’où le choix particulier et sacré du verbe « parut » dont le passé simple marque la brièveté, la soudaineté de l’apparition. Ainsi, l'historiographe peut se permettre une pause pour le portrait de l’homme « d’acier ».
Pages 77-78, une propre perception qui se voit avec le recours au « je » de l’autobiographie et le besoin de dire son ressenti de la rencontre. L’expression « avoir l’impression » annonce la subjectivité du point de vue interne (« imprimo » en latin suggère l’effet intense que produit quelqu’un ou quelque chose sur un récepteur) qui perçoit d’emblée la problématique même du tyran brillant.
Il met en exergue son point de vue personnel sachant que la réalité est autre d’où le complément antéposé « en sa personne et sur tous les sujets » (« persona » en latin signifie rôle, apparence) qui sous entend que Staline joue un rôle se reflétant sur son entourage uniformément et de manière autoritaire (« tous les » exclut toute exception). Le complément « devant moi » indique qu’il y a comme une représentation ou une confrontation, mais non une vraie rencontre.
• Le tempérament de Staline découvert
La phrase introductrice développe la clé de voute du tempérament de Staline dans un groupe nominal largement développé insistant notamment sur la puissance du personnage (« champion-ambition ») ; son intelligence tactique (« rusé »), sa tyrannie (« implacable » devant la nation « recrue de souffrance et de tyrannie »), sa passion (le verbe « brûlant » suggère métaphoriquement la feu d’une passion dévastatrice). Le « mais » adversatif oppose la puissance et la tyrannie, l’ambition et la conséquence désastreuse.
• Les moyens littéraires au service de la problématique du personnage
- Le faux semblant : est mis en valeur par le lexique du théâtre et de la duplicité pressentie par De Gaulle. (« masquer-illusions-habillé en- à l’air-donner le change »).
- Le complot comme inhérent au personnage est traduit par l’expression marquant l’habitude « rompu par une vie de complots » assimilant métonymiquement sa vie au complot. Le portrait met en exergue la capacité manipulatrice de Staline et son manque de spontanéité : à côté du vocabulaire du complot (« manœuvre-jeu-les détours de »), le général mentionne une absence totale de spontanéité dans son ressenti (« se passer d’illusions, de pitié, de sincérité » : il est condamné à la froide réalité sans évasion possible dans l’illusion sans éprouver une émotion liée à la situation de souffrance de son pays). De plus, l’expression « les détours de l’exégèse » (l'exégèse est un texte qui commente ou explique un autre), souligne l’attitude fausse et manipulatrice de Staline qui exploite en marge des textes idéologiques les données justifiant ses actes politiques : il y a dénaturation consciente.
- Les excès et la folie sous jacente : l’expression « être possédé de » montre le personnage en proie à une idée fixe (« tout en lui était…méfiance » = la tournure marque l’exclusivité, il n’est pas être de confiance, jamais ; « voir en chaque homme un obstacle ou un danger » = le distributif exclut tout répit pour la méfiance). L’ « obstination » est portée à son comble avec une quantité de verbes d’action acharnée à valeur itérative « dominer-parvenir-user de-mettre au jeu…») ainsi que les pluriels (« les occasions-les moyens de »). Il se présente comme un être en mouvement, résolu, déterminé.
- La tyrannie est mise en valeur par l’alternative ironique « subjuguant ou liquidant les autres » qui annonce le dictat.
De Gaulle admire la passion dominatrice de Staline qui décuple ses forces, pour cela, il use de différents procédés de rhétorique.
- Il personnifie la Russie pour comparer le lien du despote à son pays à une relation d’amour passionnelle et sadomasochiste. La relation de force est quasi « surhumaine » entre un homme puissant et un pays (force et audace de sa position mise en valeur par un groupe adjectival antéposé et détaché « seul en face de la Russie »).
Le cliché du premier regard (« il la vit mystérieuse …forte…durable», l’association de l’intrigue et de la puissance sont déclencheurs de l’amour) est lié au sentiment amoureux (« il l’aima à sa manière »). Les verbes de soumission « accepter comme » (cf. supercherie consentie) et « supporter » (graduation de l’acceptation résignée) instaurent un lien lié au temps déterminé (« le temps de »).
- Les tournures emphatiques avec des présentatifs dans des structures parfaitement parallèles « c’étaient les rêves de la patrie, ce furent les buts du despote » mettent en évidence la conviction de Staline à réaliser le désir fantasmé d’une nation, peu importe les moyens d’où une accumulation d’infinitifs de conquête à valeur programmatique très violents («écraser-s’étendre »).
• Retour critique sur la pseudo-victoire de Staline
- De Gaulle déplace le point de vue territorial victorieux au point de vue humain désastreux, usant de tournures hyperboliques insistant sur l’issue funeste, le nombre et l’excès (champ lexical de la mort au pluriel « souffrances-pertes humaines, tombes ruines», adjectifs modalisateurs « inouïe ») et montrant l’insensibilité du dictateur dans une position campée immobile (« au milieu de tombes et de ruines ») qui sont la conséquence de ses choix politiques.
- Explication de la pseudo-victoire par la soumission d’un peuple marqué par une servitude extrême (la « pire servitude » sous entend l’acceptation sans résistance s’opposant nettement à la résistance au pire des français) ; la profusion naturelle de ressources pourtant gaspillée (accusation de mauvaise gestion non déguisée) et l’aide des alliés. L’accumulation discrète des adjuvants au gouvernement totalitaire, indirectement montre que la victoire n’est que l’aboutissement de circonstances, d’occasions… La fascination de De Gaulle devant ce « charme ténébreux » explique notamment le réveil des foules et des sujets de Staline, malgré ses desseins funestes.
• Un personnage inconstant
Les pages suivantes (79-83) montrent un personnage inconstant, tantôt immobile, tantôt en mouvement, tantôt dans l’écoute « les yeux baissés » refusant le contact vrai, tantôt dans le chantage. La négociation devient une tragi-comédie : des gestes excessifs et forcés ; des paroles tantôt affables tantôt menaçantes pour impressionner l’assemblée française et assurer son autorité devant l’allié. L’enjeu politique est lourd : l’avenir de la Pologne. Les intimidations réciproques quant à la menace de rupture des négociations débouchent sur un accord qui montre la puissance des deux grands.
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