Lorenzaccio : lecture méthodique, acte V, sc. 7, Lorenzo et Philippe
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Rappelons que le meurtre de Lorenzo dans la pièce suit de près celui d’Alexandre, alors qu’il eut lieu, en réalité, plusieurs années plus tard, après un long exil.
• En premier lieu, Lorenzo tourne en dérision sa condamnation. L’antiphrase « Il est naturel qu’elle [sa tête] le soit dans toute l’Italie, aujourd’hui que j’ai tué Alexandre » témoigne avec ironie de la distance qu’il manifeste à l’égard de cette décision. La déclaration « le bon dieu ne manquera pas de faire placarder ma condamnation éternelle » est une manière de dénoncer l’accointance entre religion et tyrannie à travers l’antiphrase « bon Dieu » et l’hyperbole « condamnation éternelle ». Il s’amuse également de la volonté de tous de le tuer, a fortiori pour une somme d’argent : « la récompense est si grosse qu’elle les rend presque courageux » (hyperbole et décalage ironique entre l’intensif « si » et l’adverbe « presque ») ; plusieurs hyperboles « dans toute l’Italie », « dans toute l’Europe », « ma condamnation éternelle », « dans tous les carrefours de l’immensité ». Lorenzo s’amuse du paradoxe de son assassinat : ce geste était pour lui une preuve de sa vertu et de son honnêteté (libérer sa patrie du tyran) mais il est diabolisé à l’extrême par ses semblables. Ces exagérations révèlent également une certaine fierté à l’égard de son acte.
• Lorenzo fait également preuve d’autodérision ironique dans ses 5 premières répliques. À la remarque de Philippe qui lui indique qu’il n’a pas changé, Lorenzo feint de la comprendre au sens propre et répond par des observations triviales : « non en vérité, je porte les même habits, je marche toujours sur mes jambes… ».
De la même façon, lorsque Philippe met en évidence son jeune âge, Lorenzo prend le contre pied de son ami en répliquant non sans ironie : « je suis plus vieux que le bisaïeul de Saturne ». L’emploi du comparatif de supériorité traduit la tendance de Lorenzo à l’emphase mais suggère également un tempérament triste et mélancolique, la planète Saturne étant bien connue pour son influence négative voire néfaste (planète de la mélancolie) (cf. Verlaine et ses Poèmes saturniens).
Si le recours à l’humour et à l’ironie traduit une forme d’acceptation de son sort, il est surtout pour Lorenzo un masque de gaieté pour cacher sa tristesse.
Il insiste sur l’inutilité de son acte par la métaphore : « J’étais une machine à meurtre, mais à un meurtre seulement ». La tournure restrictive avec l’emploi de l’adverbe « seulement » réduit et minimise la portée de son acte en le dévalorisant. Lorenzo porte sur lui un regard sans illusion.
Sa cinquième réplique (« J’en conviens… ») rappelle la situation historique à Florence après le meurtre : l’échec et la passivité des républicains, la ville passée sous le contrôle de Côme de Médicis évoqué selon la périphrase dépréciative : « ce planteur de choux », et la répression de la révolte étudiante : « massacrer en vain ».
Toujours avec distance mais de manière plus sombre, Lorenzo ironise sur sa responsabilité dans cette situation à travers la répétition « je l’avoue, je l’avoue » et les hyperboles « c’est là un grand travers de ma part », « le plus grand tort » (superlatif) qui sont en fait à comprendre comme des antiphrases.
Lorenzo porte la responsabilité de son échec mais dénonce une dernière fois la passivité des florentins. Le présent est pour lui synonyme d’absence d’espoir et s’oppose au passé lié à l’assassinat du duc : « aujourd’hui que j’ai tué Alexandre », « je suis plus creux et plus vide qu’une statue de fer blanc ». L’évocation d’une forme de bonheur dans la bouche de Philippe est désormais inenvisageable pour Lorenzo qui affirme son pessimisme. Son acte n’a pas pu sauver Florence, pas plus qu’il ne le sauvera lui-même : « j’ai été honnête – Peut-être le redeviendrais-je sans l’ennui qui me prend » : l’emploi du mode conditionnel couplé au modalisateur « peut-être » ne laisse guère place à l’illusion.
Remarquons par ailleurs l’insistance avec laquelle Lorenzo demande à sortir se promener dans la ville. Lors de sa première réplique d’abord : « …ma mère est morte. Venez donc faire un tour de promenade, Philippe. » Cette juxtaposition de deux phrases apparemment sans lien est en fait à comprendre comme une forme de parataxe, masquant le lien implicite de cause à effet qui les relie. La mort de sa mère entraîne la volonté de sortir, c’est-à-dire, la volonté de mourir. Lorenzo, selon des accents pathétiques et tragiques, est dans l’attente de sa propre mort.
En effet, il exprime son désir de sortir à quatre reprises : l’emploi du mode impératif à valeur de prière ainsi que la répétition du verbe « prier » assimile sa demande à une dernière volonté : « Venez donc… », « sortons, je vous en prie », « je vous en prie, venez faire un tour de promenade », « je vais faire un tour au Rialto ». L’extérieur du cabinet de Philippe, la ville de Venise, représente un espace de danger de mort mais révèle également un désir d’effacement de la scène, au sens propre comme au sens figuré. Peut-on parler de suicide ? Il faut en tout cas constater chez Lorenzo l’acceptation de son sort mais aussi la nécessité d’affronter son destin (indicatif présent d’énonciation « je vais faire un tour »).
Lorenzo est conscient de la mort qui le guette et qui semble déjà l’habiter : « je suis plus creux et plus vide qu’une statue de fer-blanc ». Cette métaphore, doublée des comparatifs de supériorité, suggère une mort intérieure. L’image de la statue, en principe œuvre d’art admirée, perd toute sa noblesse et sa grandeur par l’évocation d’un métal non noble (« de fer-blanc »). Et l’expression « l’ennui qui me prend » traduit doublement ce mal-être : « l’ennui » en position sujet et Lorenzo en position objet (« me ») traduisent le mal intérieur et la mélancolie profonde qu’il ne peut que subir.
Enfin, le récit d’une tentative d’assassinat dont il a été l’objet traduit son détachement. Les termes employés, qui mêlent mépris et pitié (« un grand gaillard », « le pauvre homme », « une espèce de couteau », « un air si penaud », « un père de famille qui mourait de faim »), indiquent que Lorenzo ne prend pas au sérieux les menaces qui pèsent sur sa vie. Ce sentiment se confirme dans sa dernière réplique qui marque une lassitude et une indifférence généralisées : « attribuez cela à ce que vous voudrez ».
Lorenzo ne meurt pas sur scène ; il s’efface, seul.
Philippe n’hésite pas à exprimer sa compassion envers son ami. En effet, il perce à jour le cœur de Lorenzo et les enjeux de la situation : « votre gaieté est triste comme la nuit ; vous n’êtes pas changé ». Philippe est lucide quant à la fausse gaieté de son ami. Il comprend sa souffrance et s’en montre affecté ainsi que l’illustre l’emploi de nombreux termes se rapportant au mal-être : « Votre esprit se torture », « vous avez des travers », « C’est là votre malheur », « ton cœur est très malade ».
« Je vous en supplie, ne tentez pas la destinée » (impératif à valeur de prière) traduit l’attachement de Philippe mais surtout son effort presque désespéré pour détourner Lorenzo de la résignation et du pessimisme qui l’habitent.
Et si Philippe s’adresse à Lorenzo directement à de nombreuses reprises (pronom « vous » répété 10 fois), observons deux choses :
- l’emploi du mode impératif à la 1re personne du pluriel : « partons ensemble », « ne raisonnons point » qui traduit l’union entre les deux hommes et la souffrance partagée.
- le passage du vouvoiement au tutoiement dans ses deux dernières répliques : « tu te feras tuer », « ton cœur est très malade », ce qui suggère un désir de renforcer leur lien mais, surtout, le sentiment d’urgence et d’inquiétude grandissant chez Philippe qui cherche à déclencher une prise de conscience chez Lorenzo.
Son inquiétude se manifeste également par les multiples tentatives pour raccrocher Lorenzo à la vie et l’éloigner de ses pensées funestes :
- emploi de nombreux verbes à l’impératif présent qui traduit le ton paternel de Philippe et son désir de protection : « ne tentez pas la destinée », « Partons ensemble » ; « redevenez un homme ». Philippe tente ici d’impulser à nouveau la vie en Lorenzo, le terme d’« homme » s’opposant à la « statue » à laquelle se compare Lorenzo. De même, la phrase déclarative « L’important est de sortir d’Italie » a une valeur impérative. Même si Lorenzo mène le dialogue, Philippe adopte une attitude ferme, bien qu’empreinte de tendresse.
- Philippe tente de sauver Lorenzo de lui-même et l’exhorte à se défaire de son âme torturée à travers une série de déclarations qui tendent vers l’optimisme. L’antithèse « vous avez beaucoup fait, mais vous êtes jeune » suggère un renouveau possible et exprime la possibilité d’un avenir heureux (rappelons que Lorenzo est effectivement extrêmement jeune à l’époque des faits). Le constat « Votre esprit se torture dans l’inaction » suggère la nécessité d’une nouvelle énergie. « Vous n’avez point encore fini sur la terre » prend une dimension existentielle et répond aux aspirations passées de Lorenzo qui souhaitait se faire un nom et marquer l’histoire de son empreinte.
- Enfin, l’emploi des questions rhétoriques « N’avez-vous pas été heureux.. ? », « Pourquoi voudriez-vous mourir ? », « Pourquoi attribuer... ? » ont pour but de faire réagir Lorenzo. Philippe souhaite persuader son ami que sa vie ne s’est pas achevée avec le meurtre d’Alexandre et qu’elle ne se réduit pas à cet acte : « N’avez-vous pas été heureux autrement que par ce meurtre ? ». La tournure restrictive « quand vous ne devriez faire désormais… » et l’expression positive « un honnête homme » l’exhorte à mener une vie modeste mais vertueuse.
Malgré les tentatives de Philippe pour le sauver, Lorenzo est déjà loin. Dans ce dialogue, c’est sa résignation et sa désillusion qui l’emportent sur l’optimisme de Philippe. C’est d’ailleurs le héros qui ouvre le dialogue et le clôt d’une dernière réplique qui sanctionne l’impuissance de quiconque à le sauver et sonne comme un adieu.
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