Les représentations du monde

L’idée que la Terre est ronde circule au moins depuis le VI^e siècle avant notre ère. Les Égyptiens et les Grecs avaient acquis de nombreuses connaissances empiriques en géométrie et en astronomie.

Au III^e siècle avant J.-C., le géographe Ératosthène calcule avec précision la circonférence de la Terre à partir d’une méthode restée célèbre : au même moment de la journée, il observe l’ombre portée de deux objets placés dans deux villes différentes (Assouan et Alexandrie), sur le même méridien. À partir de la distance entre les deux villes, Ératosthène en déduit la circonférence de la Terre, avec une approximation de 1 000 km.

Au Moyen Âge, en Occident, les cartes représentent le monde divisé en trois continents entourés d’eau : l’Asie, l’Afrique et l’Europe. La mer Méditerranée se trouve au centre du monde connu. L’essor du commerce maritime pousse cependant les navigateurs portugais et espagnols à chercher de nouvelles routes de navigation.

À partir de la Renaissance, avec Colomb, Magellan, Vasco de Gama et d’autres, la connaissance que les hommes et les femmes ont du globe se développe d’un coup. Les données recueillies manquent cependant de précision et la cartographie demeure incertaine.

Des avancées technologiques comme la lunette astronomique, le chronomètre ou le baromètre permettent de gagner en précision pour mesurer et représenter le monde terrestre.

Le mathématicien et géographe flamand Gerhard Kremer (dit Mercator) développe des techniques de projection cartographique au XVI^e siècle. Sa projection devient rapidement une projection de référence pour les voyages maritimes car elle conserve les angles, et permet ainsi de tracer des routes exactes sur une carte.

Les mappemondes, globes terrestres et planisphères sont aujourd'hui des objets courants, tant en éducation qu’en décoration.

Avec les premières missions spatiales, les scientifiques et le grand public découvre la Terre vue de l’espace. Ces images suscitent de nombreux commentaires sur la beauté du globe, la finesse de son atmosphère et sa fragilité au sein de l’univers.

Les premières représentations de l’univers sont mythologiques : les fleuves, les mers et les cieux sont habités ou personnifiés par des entités divines. Les Égyptiens pensaient par exemple que le soleil était un dieu (Rê) qui voyageait chaque jour dans sa barque solaire sur la voûte céleste (Nout) qui protège la déesse Terre (Geb).

Pour les Grecs, les étoiles représentaient des héros ou héroïne. Ainsi, la Grande Ourse doit son nom à la nymphe Callisto, que Zeus avait séduite et qu’Artémis avait punie en la transformant en ursidé. La constellation des Gémeaux représente quant à elle les jumeaux Castor et Pollux, fils de Zeus et de Léda.

Ces représentations mythiques sont souvent géocentrées, c’est-à-dire qu’elles placent la Terre au milieu de l’univers, de telle sorte que tous les autres corps célestes tournent autour. Dans l’Antiquité, cette conception est défendue par Aristote ou Ptolémée.

Elle se prolonge au Moyen Âge avec l’anthropocentrisme de l’Église catholique, qui considère la Terre comme une création de Dieu et que l’être humain surplombe toutes les autres créatures.

À partir du XVI^e siècle, Copernic, Galilée, et plus tard Newton imposent une autre vision de l’univers, le modèle héliocentrique : le soleil se trouve au centre du système solaire et les planètes (dont la Terre) tournent autour en ellipse. À l’époque, cette théorie bouleverse tellement les modes de pensée qu’elle mettra environ deux siècles à s’imposer. Galilée fut d’ailleurs condamné par l’Église catholique pour l’avoir professée.

Par la suite, les nouvelles découvertes scientifiques (relativité générale) et les progrès techniques (télescopes) ont permis de dépasser le cadre du système solaire. La théorie du Big Bang fait remonter l’univers à 13,8 milliards d’années en arrière. À l’origine très dense et très chaud, il serait depuis en constante expansion. Les moyens techniques dont dispose à ce jour l’humanité ne permettent pas de remonter au-delà dans le temps.

Une partie de l’humanité a connu une phase enthousiaste d’exploration et de conquête de la Terre et du ciel environnant, qui a durablement nourri son imaginaire. Nous devons cependant composer aujourd’hui avec un monde que nous savons fini et dont les ressources sont limitées.

D’autre part, l’humanité a désormais conscience que la Terre n’est qu’une planète parmi la centaine de milliers que compte notre galaxie, la Voie lactée (quand elles gravitent autour d’une autre étoile que le soleil, on parle d’« exoplanètes »). Les humains n’occupent de toute évidence pas une place privilégiée dans l’immensité de l’univers.

Tandis que les scientifiques s’emploient à chercher, au-delà de notre atmosphère, d’infimes traces de vie extraterrestre, la science-fiction imagine quant à elle des centaines de mondes différents, tantôt déserts, tantôt luxuriants et populeux. Dès le XVII^e siècle, l’écrivain Savinien de Cyrano (dit de Bergerac) peuple par exemple la lune de Sélénites. Mais on peut également penser aux Martiens, aux Klingons et aux Vulcains de Star Trek, aux Wookiees et aux Ewoks de Star Wars, ou aux xénomorphes de la saga Alien.

La fiction semble ainsi compenser le vertige de savoir l’univers sans limite, tel que Pascal l’exprime dans ses Pensées : « Le silence éternel de ces espaces infinis m’effraie. »