Les pouvoirs sous la Ve République
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La Ve République, résultat d’une histoire particulière, est formalisée par la rédaction d’une nouvelle constitution le 4 octobre 1958 et se caractérise par la prépondérance de deux personnages centraux dans les institutions : le Chef de l’Etat et le Chef du gouvernement. Si la norme suprême a fixé les règles déterminant leur place et leurs relations dans la République, la révision constitutionnelle de 1962 conduisant le Président de la République à être élu au suffrage universel directe et la pratique présidentielle depuis 1958, n’en n’ont pas moins fortement façonné leur importance. Au-delà même des mots et des articles, la constitution est, selon la définition de De Gaulle qu’il donne le 31 janvier 1964, « un esprit, des institutions, une pratique » :
- l’esprit correspond à la gouvernance par le président,
- les institutions sont celles établies par le texte de la constitution,
- la pratique renvoie à l’application de cette constitution par les responsables politiques depuis 1958.
Doc. 1. La Constitution du 4 octobre 1958 exposée au Conseil constitutionnel. Début de la Ve République |
Élu pour un quinquennat depuis la révision constitutionnelle d’octobre 2000 (septennat auparavant), il concentre de nombreux pouvoirs :
- il nomme le Premier ministre et met fin à ses fonctions sur présentation de la démission du gouvernement ;
- il préside le Conseil des ministres ;
- il promulgue les lois votées par le Parlement ;
- il dispose d’un pouvoir d’initiative référendaire sur proposition du gouvernement ou du parlement pour soumettre au peuple français tout projet de loi portant sur l’organisation des pouvoirs publics, sur la politique économique et sociale de la nation.
Mais plus encore que ces pouvoirs consacrés par la Constitution, le Président de la République dispose d’un pouvoir politique déterminant qui lui est conféré par son élection au suffrage universel direct depuis la réforme constitutionnelle de 1962. Selon l’article 21 de la Constitution, le Premier ministre « dirige l’action du gouvernement » mais son action ne serait pas possible s’il ne disposait pas de la confiance du Président. Il n’est pas écrit que le Premier ministre soit responsable devant le Chef de l’État mais il ne pourrait rester à son poste si la relation avec celui-ci ne reposait pas sur cette confiance. Cette relation de dépendance tacite relève de l’interprétation de la Constitution, et plus encore de la différence de légitimité politique entre les deux têtes de l’État.
Le Président est considéré comme le chef des armées. Il assure l'exécution des lois. Sous réserve des dispositions de l'article 13, il « exerce le pouvoir réglementaire et nomme aux emplois civils et militaires ». L’article 13 renvoie aux prérogatives que le Chef de l’État détient en signant les ordonnances et les décrets délibérés en Conseil des ministres et en nommant aux emplois civils et militaires. Le Premier ministre est donc assujetti aux pouvoirs du Chef de l’État,et son action ne pourrait avoir de sens sans le soutien de celui-ci, sauf, dans une certaine mesure, en situation de cohabitation.
Le Premier ministre dispose alors de prérogatives pour diriger le travail gouvernemental. Mais là encore, le Chef de l’État s’autorise un droit de regard, voire même d’intervention directe sur ce travail. Les instructions du Premier ministre aux ministres ont pour objectif d’organiser l’action du gouvernement. Sous la forme de circulaires, le Premier ministre indique les grandes directions de son action, et peut aussi préciser les orientations propres à chaque ministère. Il intervient bien évidemment oralement auprès de ses ministres pour recadrer si nécessaire leurs actions.
Mais dans certaines circonstances, le Chef de l’État n’hésite pas en faire de même, il lui arrive même d’adresser directement aux ministres une lettre de mission.
Le Premier ministre joue par ailleurs un rôle d’arbitre entre ses ministres afin de trancher entre des points de vue divergents. Même si le Chef de l’État n’est pas tenu de remplir ce rôle, ces arbitrages sont forcément évoqués en Conseil des ministres ; le Chef de l’État ne peut donc qu’en être mis au courant et formuler ainsi un avis qui engage le Premier ministre et son gouvernement.
Dans le cadre de la Ve République, ces deux fonctions font l’objet d’un encadrement assez strict qui renvoie au processus de rationalisation des pouvoirs parlementaires voulue par les rédacteurs de la Constitution. Cela ne signifie pas que le Parlement ne possède aucun pouvoir mais cela conduit à en limiter l’importance, même si le Parlement demeure un contre-pouvoir important.
Doc. 2. Salle des séances du palais Bourbon où se réunissent les membres de l'assemblée nationale française |
En ce qui concerne sa fonction législative, le Parlement a vu son action encadrée par la Constitution. En effet, celle-ci confie au gouvernement davantage de moyens pour encadrer et organiser le travail du Parlement. Le gouvernement dispose d’une maîtrise certaine des ordres du jour des travaux parlementaires et de la possibilité de s’opposer aux textes ou amendements ne lui convenant pas.
Le domaine de la loi à la différence des régimes précédents, est strictement défini par la Constitution, et le Parlement ne peut y déroger sous peine d’empiéter sur le domaine réglementaire appartenant à l’exécutif. Mais il en est de même pour le gouvernement qui ne peut empiéter sur le domaine de la loi. Ce sont les articles 34 et 37 qui définissent les domaines respectifs de la loi et du règlement. Le domaine de la loi concerne par exemple les principes fondamentaux liés à la défense nationale, l’enseignement, le droit du travail, ou bien encore le régime de propriété.
Si l’initiative des lois appartient concurremment au Premier ministre et aux parlementaires, dans les faits les projets de loi du gouvernement sont plus nombreux que les propositions de lois issues du Parlement, et ce en raison de la maîtrise des ordres du jour par le gouvernement, et la priorité qui leur est accordée par la Constitution. Depuis la réforme constitutionnelle de 2008, cependant, les projets de lois doivent être soumis à l’appréciation de la conférence des Présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat. En cas de désaccord entre le gouvernement et le Parlement, le Conseil constitutionnel peut être saisi et imposer au gouvernement de transmettre les informations de toutes nature nécessaires pour éclairer la décision du Parlement. Les textes font l’objet d’un examen par les commissions parlementaires. Sur la question des ordres du jour des chambres, la révision constitutionnelle de 2008 offre davantage d’opportunités pour le Parlement de présenter des propositions de lois en permettant qu’une séance par mois soit réservée aux initiatives parlementaires.
Le Parlement contrôle par ailleurs l’activité du gouvernement. Il dispose du droit de déposer des questions écrites auprès du gouvernement et le droit de formuler des questions orales lors d’une séance qui leur est consacrée (séance d’actualité). Par ailleurs, le Parlement dispose d’un pouvoir d’investigation sur l’action du gouvernement par le jeu des commissions parlementaires qui peuvent se saisir de questions portant sur l’ensemble des mesures gouvernementales. Les personnes interrogées dans ce cadre sont tenues par l’obligation de vérité et le secret professionnel peut être levé dans certaines circonstances. Le Parlement assure ainsi un contrôle certain de l’action gouvernementale.
Enfin, le Parlement dispose de la possibilité de mettre en jeu la responsabilité du gouvernement par un la procédure du vote de confiance et la motion de censure, prévues par l’article 49 de la Constitution.
Doc. 3. Le Conseil Constitutionnel | Doc. 4. Le Conseil d'État |
Le Chef de l'État dispose de pouvoirs importants et de domaines réservés qui lui confèrent le sommet du pouvoir exécutif. Le Premier ministre dirige le gouvernement dont la fonction principale est de « déterminer et conduire la politique de la nation ».
Le Parlement quant à lui remplit deux fonctions principales qui sont le vote de la loi et le contrôle de l'action du gouvernement. Même si ses fonctions ont été rationalisées par la Constitution, il n'en demeure pas moins qu'il constitue un contre-pouvoir certain. Ce rôle de contre-pouvoir est aussi assumé par les juridictions suprêmes que sont le Conseil constitutionnel et le Conseil d'État qui garantissent le bon fonctionnement de l'État de droit.
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