Le lien social est-il en crise ?- Première- SES
- Fiche de cours
- Quiz et exercices
- Vidéos et podcasts
- Connaitre les différents types du lien social et leurs évolutions.
- Les instances traditionnelles d'intégration traversent sans doute une crise qui explique probablement l'amoindrissement des liens sociaux.
- Il faut cependant observer aussi les capacités de rebonds de ces instances et les capacités créatrices de notre société pour sortir de la crise.
Considérons quatre sphères de l'intégration :
- tout d'abord, le travail, le premier grand intégrateur qui donne revenu, statut, identité, relations sociales ;
- puis l'État qui par le biais de l'école et de la protection sociale (État providence) permet la socialisation, la formation, l'assistance et l'assurance, mais aussi la participation politique ;
- la famille qui est l'instance de socialisation par excellence et qui tisse un réseau de solidarités important ;
- et enfin la sphère des associations d'entraide, des amitiés, les clubs...
Ces quatre sphères peuvent avoir plus ou moins, suivant les périodes, de capacités à intégrer, ou à exclure. Qu'en est-il aujourd'hui ?
Après 1945 était apparue une norme
d'emploi caractérisée par le plein
emploi, des emplois stables, des assurances sociales
liées au travail et par un salaire minimum. Mais
avec le développement du chômage,
des emplois précaires, des temps partiels
subis, on peut se demander si la cause des cas
d'exclusion actuels ne réside pas dans la
dégradation de la condition des
salariés. Le lien social en crise aurait
alors pour origine : le travail !
Un emploi précaire ne permet pas à
l'individu de consommer comme les autres. Il ne peut
pas faire de projets à long terme ou encore
prétendre à des positions
hiérarchiques élevées. Ses
relations sociales à l'intérieur de
l'entreprise sont limitées et il ne peut pas
développer son capital social. La
multiplication des travailleurs pauvres pose ainsi un
problème d'intégration.
À l'opposé de cette thèse, on peut dire toutefois que la population active n'est encore que minoritairement touchée par la précarité du travail et que le taux de chômage élevé est accompagné d'une protection sociale (indemnités chômage par exemple) conséquente. La France est ainsi moins exposée à l'exclusion sociale du fait des problèmes d'emploi grâce à son système de protection sociale efficace. Ce n'est pas le cas de pays comme les États-Unis par exemple.
Dans notre société, l'État a
joué un rôle important dans la
construction volontaire de la nation et du lien social.
Les contributions de l'État sont
nombreuses : l'école publique encadre
aujourd'hui 15 millions d'élèves et
d'étudiants, l'État est aussi patron et
emploie un grand nombre de fonctionnaires. De plus,
l'État protège par l'intermédiaire
de sa fonction d'État providence.
Il exerce une protection économique
(allocation chômage par exemple) mais aussi
sociale (accompagnement des chômeurs pour
retrouver un emploi avec le pôle emploi). Il
combat l'exclusion et crée une
solidarité horizontale (des bien-portants
vers les malades par exemple) et verticale
(des plus riches vers les plus démunis) entre
tous les citoyens.
La crise de l'État est manifeste si l'on observe
les difficultés de financement de la
protection sociale : les dépenses
augmentent et les recettes diminuent.
L'efficacité des dépenses est par
ailleurs contestable, puisque l'exclusion ou la
pauvreté dans notre pays ne diminuent pas,
malgré les sommes allouées toujours plus
fortes en direction des plus démunis. La
crise de la dette des États
européens les pousse à devoir faire des
économies budgétaires qui se
répercutent sur la qualité de la
protection sociale.
L'État traverse sans doute une crise de
légitimité : les aides
sociales, les services sociaux intègrent
efficacement mais les actions de l'État
continuent de paraître insuffisantes car les
objectifs affichés (résorber l'exclusion)
ne parviennent pas à être pleinement
atteints. De plus en plus de discours
s'élèvent contre « l'assistanat
» crée par les aides publiques et des
mesures comme une contrepartie de 7 heures de travail
pour les allocataires du RSA illustrent cet état
de fait.
Les mutations importantes de la famille (divorces,
concubinage, célibat, familles
monoparentales...) affaiblissent le lien social. Les
ruptures familiales semblent fragiliser l'individu et
participer au processus d'exclusion.
Robert Castel fait un lien entre l'exclusion,
l'emploi et la famille. Pour lui l'exclusion est un
processus. Un individu touché par des
problèmes d'emploi entre dans une zone de
vulnérabilité où l'exclusion
le guette si le lien familial est lui aussi rompu.
Malheureusement on ne peut que constater un lien
statistique entre le chômage et le divorce.
L'individu entre alors dans ce que Castel nomme la
zone de désafiliation où le lien
social est totalement rompu.
On note le maintien des formes de solidarité
entre les générations : les
échanges de services sont très nombreux
(garde des petits-enfants, cohabitation plus longue
avec les parents, aides financières...), les
familles forment des réseaux plus complexes
aujourd'hui mais pas forcément moins
efficaces.
Les liens familiaux peuvent se renforcer après
une séparation car ils ne sont plus
mécaniques mais beaucoup plus
électifs. Les individus doivent alors
faire des efforts pour maintenir ces liens les plus
forts possible. Les individus trouvent toujours dans la
famille un refuge moral et affectif dans les
périodes difficiles quelque soit la forme de la
famille.
Les associations et les clubs forment des réseaux importants qui tissent des relations entre les individus, permettent à la socialisation de s'inscrire dans le temps, en d'autres termes, au lien social de subsister. Il semble que ces nouvelles formes de solidarités jouent désormais le rôle qu'ont pu jouer autrefois les solidarités de classes, les syndicats, les partis politiques, et l'apparition de nouvelles instances d'intégration laisse penser que la société connaît des capacités de réaction importantes face aux crises.
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