La religion- Terminale- Philosophie
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Comprendre la notion de religion
- La religion, très présente dans la société du Moyen Âge, a vu son pouvoir décliner dès la Révolution française au profit de l'athéisme.
- À l'époque des Lumières, la religion est remise en cause au profit de la raison.
- Les philosophes critiquent généralement la religion, qu'ils jugent dévalorisante, aliénante ou encore infantilisante.
La religion a longtemps structuré les
sociétés humaines. Le phénomène
religieux, plus discret au sein des démocraties
occidentales contemporaines, essentiellement basées
sur le principe de laïcité, continue
d’être prépondérant dans une grande
partie de l’ensemble des pays du monde.
L’étymologie du terme est double : dans une
première acception, religare signifie, en
latin, « relier, attacher ». La
religion est ce qui « relie » les
hommes à la dimension du sacré ; dans une
seconde acception, religere a le sens de
« recueillir de nouveau, rassembler ».
En ce sens, la religion correspond à une pratique
institutionnalisée, à l’exercice
d’un culte et renvoie aux cérémonies qui
lui sont liées.
Pour le sociologue français Émile Durkheim
(1855-1917), religion et société sont
interdépendantes. Cela signifie qu’une croyance
collective a une importance sociale essentielle. À ce
titre, la religion représente donc un
phénomène social universel, qui instaure une
distinction fondamentale entre ce qui appartient au domaine
du sacré et ce qui appartient à celui du
profane. La religion aurait en outre contribué
à civiliser les hommes, en imposant des règles
morales.
Au sein des premières sociétés
humaines (sociétés dites
« archaïques », ou
« premières »), le lien
social est essentiellement religieux. La religion est
constitutive de la vie en commun, et joue le rôle
de régulateur des relations entre les
hommes.
Pendant toute la période du Moyen Âge, la
raison et la foi (la philosophie et la théologie)
se sont opposées. Saint Anselme, au
XIe siècle, et saint Thomas, au
XIIIe siècle, mettent la
philosophie « au service de la
théologie ». On ne doit pas, disait-on
à l’époque, « mettre le
vin fort de la parole de Dieu avec l’eau de la
raison ». À partir du
XVIIe siècle, il s’agit de
reconnaître que la foi et la raison recouvrent un
domaine propre à chacune.
La Révolution française, symboliquement,
instaure la séparation du pouvoir religieux
et du pouvoir politique. Aujourd’hui, les
États sont laïcs lorsqu’ils
décident de se priver du support de la religion,
en la confinant à la sphère
privée. Deux mesures prises par les
révolutionnaires témoignent de cette
évolution. Premièrement, le calendrier
républicain remplace le calendrier
grégorien (lequel réapparaît
cependant en 1806, avec Napoléon).
Deuxièmement, le culte de la raison se
substitue au culte de la foi. Le courant rationaliste
(essentiellement celui des Lumières) assimile la
religion à une superstition. Il inaugure donc
l’athéisme. L’esprit des
Lumières s’oppose à
l’obscurantisme et à
l’ignorance ; l’essor des sciences est
inséparable du déclin de la religion.
L’Église (la religion officielle) est remise
en cause ; apparaît la notion de
« tolérance » :
sont dénoncés les excès de
l’Église, voire le fanatisme religieux.
Voltaire (1694-1778) veut « écraser
l’infâme »,
c’est-à-dire la religion catholique,
intransigeante et dogmatique. Dans le Traité
sur la tolérance (1763), Voltaire veut
réhabiliter le protestant Calas, injustement
accusé d’avoir tué son propre fils,
et condamné à mort. Sont visés les
catholiques, qui pensent que leur religion est la seule
« vraie » religion. Diderot
(1713-1784) distingue le respect des règles
religieuses, et le respect des règles morales.
L’homme est capable, selon lui,
d’édicter ses propres règles morales.
Apparaît de cette manière un nouvel
humanisme. Sans récuser la foi (il peut exister
une religion « naturelle »), les
philosophes des Lumières affirment donc
l’indépendance de la raison par
rapport à la foi. La foi concerne le salut de
l’âme, et la raison la recherche de la
vérité.
Certains estiment aujourd’hui que le projet
d’une morale humaine, immanente,
indépendante des commandements de la religion, a
échoué. Nous ne pourrions nous passer de la
transcendance divine (Dieu est au-dessus des hommes, et
dicte les règles suprêmes du bien et du
mal). L’individualisme a triomphé, et les
valeurs communes véhiculées par la religion
se sont perdues. Chaque individu défend ses
propres valeurs, qui correspondent en fait à
ses propres intérêts. Les
sociétés modernes n’auraient pas
été capables, en résumé, de
créer des valeurs universelles, capables de
rassembler tous les individus d’une même
société.
Nietzsche (1844-1900) pense que la religion s’oppose à la vie et dévalorise tout ce qui relève du corps et de l’instinct. Intérioriser les instincts, dit en substance Nietzsche, ne peut que rendre l’homme malade, ou décadent. La religion est établie sur les notions de péché, de salut, de grâce ou de rédemption. Elle encourage en l’homme la faiblesse et la résignation. La morale judéo-chrétienne, d’une manière générale, s’oppose à l’épanouissement du corps, à la puissance vitale présente en chaque homme, et à l’acceptation de soi. La religion est « un monde de fictions pures » (Antéchrist), qui « a sa racine dans la haine contre le naturel ». Et Nietzsche de conclure :
Selon Marx (1818-1883) la religion aliène les individus et valorise ce qui est abstrait, irréel. Elle masque, à ce titre, la réalité sociale et politique dans laquelle se trouvent les individus. Elle consent aux injustices que créent les inégalités de condition entre les hommes.
(Contributions à la critique de la philosophie du droit de Hegel, introduction)
Selon Marx, pour que le « bonheur
réel » du peuple puisse se substituer
au « bonheur illusoire », il faut
par conséquent supprimer la religion. Complice de
la classe dominante, favorable aux idées de la
bourgeoisie, elle empêche que triomphent les
idées révolutionnaires.
Pour Freud (1856-1939), dans L’avenir
d’une illusion, la religion est cette
« illusion » qui aide l’homme
à supporter les souffrances de l’existence
et l’angoisse de la mort. L’homme est pareil
à l’enfant qui désire être
aimé et protégé ; Dieu joue le
rôle de ce père aimant et protecteur. En
tant que création de l’homme, le stade du
religieux, qui est celui de l’infantilisme,
doit donc être dépassé :
La névrose et la religion semblent liées ; on pourrait même, écrit-il encore, qualifier la névrose de religiosité individuelle, et la religion de névrose obsessionnelle de l’humanité. La religion est une maladie dont l’homme doit guérir.
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