La comédie grecque et latine
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L'actualité politique et sociale tient une place prépondérante dans les pièces d'Aristophane, pour la plupart des œuvres engagées, qui attaquent le présent et font appel aux valeurs du passé. Pour lui, la comédie, au même titre que la tragédie, a un devoir d'éducation. C'est ainsi qu'il met en scène démagogues, sophistes, juges et autres corrompus de tous bords, dans une fantaisie comique extrêmement débridée et inventive, car si cet amuseur se plaît à châtier les mœurs de son temps, le rire prime dans ses comédies.
À la différence de la tragédie, les acteurs ne sont pas limités à 3 dans la comédie. Leurs masques sont plus petits que ceux des tragédiens. Le chœur est constitué, outre le coryphée (chef de chœur), de 24 choristes.
Du point de vue de la forme, une comédie suit un découpage précis :
√ Le prologue, exposition du sujet de la pièce ;
√ La parodos, entrée du chœur ;
√ L'agôn, combat verbal entre chœur et acteurs ;
√ La parabase, dans laquelle le chœur exprime généralement la pensée de l'auteur ;
√ L'exodos, fin de la pièce et sortie du chœur.
Beaucoup de choses ont changé à Athènes depuis Aristophane : la situation politique et sociale de la Grèce connaît une transformation radicale entre la période de la guerre du Péloponnèse et celle de la guerre lamiaque.
Du point de vue littéraire, avec Ménandre et ses contemporains, le goût n'est plus ni à l'obscénité, ni à la satire politique. Le 4e siècle avant J.-C. est le temps de la réflexion philosophique et morale mais aussi de la dépolitisation : le chœur voit son rôle diminuer, au profit de la parole. À la différence des comédies d'Aristophane, au centre desquelles se trouve la collectivité, la Néa fait place aux préoccupations individuelles.
Le canevas de base est à peu près toujours le même et les personnages de la Néa sont des rôles codés, dont l'écrivain Apulée a laissé une liste, non exhaustive : « le proxénète déloyal, l'amoureux brûlant de passion, l'esclave rusé, la maîtresse coquette, l'épouse acariâtre, la mère indulgente, l'oncle grondeur, le camarade secourable, le militaire belliqueux, le parasite glouton, le père avare, la courtisane effrontée. »
Une cinquantaine de masques étaient utilisés pour signifier ces rôles.
Ainsi, comme le note Florence Dupont dans son ouvrage Le Théâtre latin :
« La société mise en place par la Néa ne représente pas la société des hommes, elle n'en est même pas l'image déformée, caricaturée ; c'est, en quelque sorte, une utopie domestique, puisque la société est réduite à la famille. »
Beaucoup de ces personnages ont fait les beaux jours du théâtre européen : de Plaute et Térence à la commedia dell'arte bien sûr, sans oublier ce que leur doivent Shakespeare, Molière et Beaumarchais.
Les deux auteurs latins ont produit des œuvres extrêmement différentes bien qu'ils aient puisé à la même source, la nouvelle comédie grecque, les sujets de leurs pièces. Il semble que dans le répertoire de la Néa, Plaute préfère les motoriae (pièces mouvementées) aux statariae (pièces calmes) choisies par Térence.
Historiquement, à l'époque de Térence, on admire davantage les Grecs (d'ailleurs tous les titres des pièces de Térence sont grecs) que l'on ne s'en moque, comme c'était le cas à l'époque de Plaute, où l'hellénisme était beaucoup plus exotique, au sens étymologique du terme. De fait, les pièces de Plaute, outre qu'elles accordent une place prépondérante aux parties chantées et chorégraphiées, ont plus de truculence, de force comique, que celles de Térence qui privilégient la parole. Térence, dans ses œuvres, s'intéresse davantage à des problèmes moraux, le conflit des générations ou le problème de l'éducation, que Plaute, dont la verve comique porte davantage sur des caractères.
Les oeuvres de Térence sont les suivantes : Andria (la jeune fille d'Andros), Eunuchus (l'Eunuque), Hecyra (la belle-mère), Héautontimoroumenos (le bourreau de soi-même), Phormio (le Phormion, nom d'un parasite), Adelphi (les Adelphes, les deux frères).
Le théâtre de Plaute est varié, de la comédie d'intrigue, comme Mostellaria (comédie des Fantômes), Menaechmi (Les Ménechmes, nom de deux frères jumeaux), Pseudolus (Le Menteur), à la comédie de caractère, Aulularia (La Marmite, dont Molière s'est largement inspiré dans L'Avare), Miles Gloriosus (le soldat fanfaron), en passant par la farce, Asinaria (la pièce aux ânes), la comédie romanesque, Captivi (les Captifs) et même la tragi-comédie, le célèbre Amphitruo (Amphitryon).
Issus du catalogue des rôles de la Néa, les personnages de la comédie romaine sont strictement codés, mais n'ont aucun référent extra-théâtral et surtout chaque rôle implique de la musique et de la danse.
Les comédies latines ne sont pas découpées en actes et en scènes, mais font alterner le canticum (chant) et le diverbium (parole). La comédie est le passage d'un état initial instable mis en place par le prologue qui utilise le diverbium à un état final stable, célébré par un ballet. Entre les deux se succèdent des séquences comiques généralement constituées d'un canticum d'entrée de rôle avec un des personnages en aparté, puis d'un canticum de duel opposant les deux personnages précédents suivi d'un monologue en diverbium.
Cette place accordée à la musique, très importante chez Plaute, outre qu'elle nous renvoie aux origines du théâtre romain, nous renseigne aussi sur ce que les romains attendent d'un spectacle : il faut que cela soit festif, ludique et que cela s'adresse davantage au sens musical qu'à l'intellect. D'où peut-être le moindre succès de Térence.
D'après Tite-Live, dans son Histoire romaine, livre VII, chapitre 2, le théâtre à Rome est né de préoccupations religieuses. Pour lutter contre la peste qui sévissait en 364 avant J.-C., on avait institué des jeux scéniques étrusques : « Sans paroles, sans mimique pouvant en tenir lieu, des baladins venus d'Étrurie dansaient au son des flûtes. » Puis des acteurs non professionnels introduisirent la parole, avant que des histrions, comédiens professionnels, ne se mettent à interpréter des saturae, sorte de spectacle total.
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