L'Atalante : la séparation, les retrouvailles
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La séparation de Juliette et de Jean s’impose dans le film de Jean Vigo comme la suite logique d’une série d’épreuves que le couple a traversée avec quelques difficultés. En effet, les disputes conjugales se font de plus en plus fréquentes à bord de l’Atalante et les promesses de réconciliation qui leur font suite aboutissent toujours à d’amères déceptions.
La joie de Juliette de visiter Paris est ainsi ajournée par l’absence du père Jules parti en consultation, et les moments de tendresse qu’elle vient chercher auprès de son mari, dans leur lit, un peu plus tard, après le retour du vieil homme, sont rapidement interrompus par ce même père Jules, complètement soûl, dont les chants réveillent Jean et précipitent le départ de la péniche loin de la ville.
Le lendemain, pourtant, Jean emmènera Juliette boire un verre dans une auberge mais la présence d’un camelot charmeur lui fera regretter cette concession. La réapparition du trublion, près du bateau, venu proposer à la jeune femme de l’emmener à Paris, achèvera de le faire enrager…
L’attirance de Juliette pour la ville se fait de plus en plus forte. Elle va bientôt céder à sa curiosité, elle va quitter le bateau pour assouvir enfin un désir que Jean ne semble pas disposé à satisfaire. Son départ est annoncé par une mise en scène très soignée et particulièrement subtile, une mise en scène de l’opposition qui préfigure la séparation imminente des amants. Cette opposition connaît de nombreuses modalités concerne :
- les lieux dans lesquels les
personnages sont confinés (Jean est en
haut, sur le pont / Juliette est en
bas, dans la chambre),
- les attitudes (Jean
est agité, il fait les cent pas, sans
interruption depuis une bonne partie de la journée /
Juliette est calme, souriante, immobile),
- les mouvements de
caméra (Juliette
est montrée en plan fixe tandis que
les allers-retours de Jean sont suivis par de
rapides panoramiques),
- la lumière
(Jean est plongé dans une
épaisse obscurité
/ le visage de Juliette baigne au
contraire dans une lumière intense),
- le son (On entend le
bruit régulier, mécanique, des pas de
Jean qui s’oppose aux voix
intérieures qui bercent Juliette : ces voix
sont celle du mari qui refuse et celle du
camelot qui invite, ce sont des échos de
répliques précédentes chuchotées
maintenant comme pour griser ou tenter la jeune femme).
Le montage fait alterner avec régularité les plans de Juliette dans la cabine et ceux de Jean sur le pont, non pas tant pour exprimer la simultanéité des scènes (même si celle-ci est incontestable, le montage exprime beaucoup plus que cela), mais pour faire apparaître on ne peut plus clairement maintenant tout ce qui les sépare l’un de l’autre.
Cette opposition est ainsi prise en charge par un montage parallèle absolument fondamental qui rend la séparation inévitable. Il n’est d’ailleurs même plus nécessaire de la représenter explicitement pour que le spectateur la comprenne. On ne voit pas Juliette se lever, ni s’habiller, ni prendre ses affaires… Une ellipse suffit largement : Jean descend se coucher, Juliette fait semblant de dormir puis se retourne violemment, Jean s’en va vexé et claque la porte. Un plan de coupe nous montre le père Jules en train de faire une réussite. Puis on voit Juliette, toute prête, sortir sur le pont et partir. Jean redescend, ouvre la porte de la chambre et trouve le lit vide. La série des oppositions précédentes et l’ellipse du départ permettent ainsi une économie de la représentation tout à fait efficace.
Après le départ de Juliette, et avant leurs véritables retrouvailles, les deux amants se rencontrent à deux reprises, mais de façon très inhabituelle puisqu’il s’agit de deux rencontres oniriques.
Jean, qui a pourtant décidé lui-même de ne pas attendre le retour de sa femme, est en pleine détresse : Juliette lui manque terriblement. Pour apaiser cette douleur, il plonge dans l’eau afin d’y voir son image (ainsi qu’elle le lui a elle-même enseigné). Et effectivement, le miracle poétique a bien lieu, l’image de Juliette apparaît en surimpression sur celle de Jean. Ce procédé est très intéressant parce qu’il réunit les deux personnages en maintenant toutefois entre eux une distance infranchissable : ils sont dans le même cadre, mais appartiennent à deux plans différents. La différence d’échelle de leurs représentations (elle est beaucoup plus petite que lui), de lumière (elle irradie véritablement, comme une espèce de spectre fantasmatique) et d’apparence de leurs corps (les gestes et les cheveux de Jean sont ralentis par l’eau tandis que ceux de Juliette sont fouettés par un vent violent) soulignent cette distance qui est tout simplement celle du désir : pour qu’il y ait désir en effet, il faut une distance entre le sujet désirant et son objet désirable.
La deuxième rencontre onirique est très
différente formellement, même si elle partage les
mêmes enjeux. C’est ici un montage parallèle qui commence à
réunir les corps : Jean est
seul sur le pont de L’Atalante, Juliette est seule sur un
pont, au-dessus de l’eau. Puis on voit Jean et
Juliette réaliser les mêmes gestes, avoir les
mêmes attitudes. Ils se déshabillent, puis
ils se caressent, regardent dans la même direction, vers la
caméra. Les plans qui nous les montrent alternent
régulièrement, les mêmes gestes étant
présentés sous les mêmes angles de
caméra et éclairés par la même
lumière. Ici, le montage
parallèle se transforme donc en montage des
correspondances. La scène est
l’antithèse de la séquence de la
séparation : là-bas, en effet, le
montage parallèle soulignait une
opposition, ici il crée une
ressemblance qui réunit les personnages
dans le même désir, dans le même
rêve : la fusion est effective
malgré la distance qui les sépare encore. Les
véritables retrouvailles finiront alors par
résoudre une telle distance dans le récit.
Les véritables retrouvailles sont provoquées par le père Jules parti à la recherche de Juliette pour remettre Jean sur pied, Jean que la compagnie suspecte de ne plus commander l’Atalante. La détermination du fantasque vieillard n’a d’égale ici que sa toute nouvelle tranquillité. Il marche d’un pas étonnamment fluide et souple, presque mélancolique, qui tranche avec la frénésie qu’on lui connaissait jusqu’alors (lors de ses danses, de ses colères, de ses simulations de luttes), il s’assoit calmement sur un banc, croit reconnaître Juliette, puis reprend sa route.
Juliette entre de son côté dans une boutique de musique pour écouter « Le chant des mariniers » qui lui rappelle Jean. Vigo nous propose alors un plan du haut-parleur extérieur qui balaie l’espace comme pour laisser se diffuser toute la tristesse de Juliette, comme pour appeler aussi le père Jules qui apparaît de l’autre côté de la vitrine. La magie opère, le père Jules entre dans le magasin, ôte sa casquette, laisse apparaître ainsi le reflet de son visage que Juliette reconnaît immédiatement, puis il retrouve toute sa gaillardise et enlève sur ses épaules la jeune femme qui se laisse prendre au jeu.
Sur l’Atalante, le mousse indique à Jean que le père Jules est allé chercher Juliette. Emu, le patron sort de sa léthargie, il se prépare, se lave, se rase et retrouve enfin lui aussi toute sa vitalité. Il range un peu, passe un chiffon rapide sur quelques meubles. Un montage alterné puis convergent (quand le mousse annonce qu’ils arrivent) mêle alors les plans de Jean qui attend et ceux de Juliette qui approche avec le père Jules. Les retrouvailles vont donc bientôt avoir lieu, au sein même de l’histoire, et plus seulement en rêve. Les deux amants sont maintenant face à face, dans le bateau. Le temps est suspendu quelques secondes, puis tous les deux s’abandonnent enfin à leur désir et à leur joie : un désir qui avait déjà été capable de les réunir malgré l’éloignement, et qui maintenant, toujours aussi intense, les renverse littéralement. Le montage alterné a ainsi réuni dans la même joie collective des personnages isolés dans leur propre solitude tout en résolvant le drame du film. L’Atalante navigue à nouveau, le plan aérien qui clôt le film ne fait qu’abandonner maintenant le bateau à ses propres aventures.
La séparation et les différentes retrouvailles de Jean et Juliette décrivent un mouvement très éloquent que la réalisation de Vigo trace avec beaucoup d’intelligence. En effet, grâce à son traitement de la lumière, du son, des mouvements de caméra, grâce à la mise en scène des corps et au montage parallèle qu’il a dirigé, le cinéaste parvient à nous faire éprouver la séparation des personnages bien qu’ils soient encore présents dans le même lieu (la péniche). Le récit (le départ de Juliette) ne fait finalement qu’actualiser ce que le spectateur a déjà senti et compris. Ensuite, grâce à la surimpression puis au montage des correspondances, Vigo parvient à réunir les personnages malgré leur éloignement : il laisse ainsi s’exercer toutes les puissances du désir. Enfin, grâce à un montage alterné convergent, il ne fait qu’actualiser au sein de l’histoire elle-même (Les montages alternés et convergents sont des montages dramatiques, strictement narratifs) ce que le rêve et le désir avaient déjà préfiguré et suggéré de façon hautement poétique.
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