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Jean-Jacques Rousseau

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Jean-Jacques Rousseau est né en 1712, à Genève ; il meurt à Ermenonville, non loin de Paris, en 1778. Il est écrivain, philosophe, mais aussi musicien : il a en effet composé un petit opéra, Le devin du village, représenté au château de Vincennes devant Louis XV, en 1752. Rousseau fut aussi botaniste, puisqu'il rédigea, à partir des herbiers qu'il avait constitués, huit Lettres élémentaires sur la botanique.
Mais Rousseau est surtout connu pour ses écrits politiques, notamment pour Du Contrat social (1762), théorie majeure du XVIIIe siècle jusqu'à nos jours, de l'histoire des institutions politiques, et pour ses œuvres autobiographiques : Les Confessions (1766-1769), Rousseau juge de Jean-Jacques (1772) et les Rêveries du promeneur solitaire, ouvrage rédigé dans les deux dernières années de sa vie. L'Emile, ou De l'éducation demeure également une œuvre pédagogique majeure. Julie, ou La Nouvelle Héloïse, sorte de roman philosophique, contribua, au moment de sa parution en 1762, à faire de Rousseau l'un des plus célèbres écrivain du Siècle des Lumières, qui est également le siècle de la Révolution française.

 

1. La philosophie politique de Rousseau
a. L'apport majeur du «Contrat social» (1762)

Avec les philosophes anglais John Locke 1632-1704) et Thomas Hobbes (1588-1679), Rousseau est considéré, en élaborant une théorie du contrat ou du pacte social, comme l'un des fondateurs des démocraties contemporaines. L'ambition de Rousseau est de réformer la société française, qu'il juge à la fois corrompue, inégalitaire et injuste : « Tout est bien sortant des mains de l'auteur des choses, tout dégénère entre les mains de l'homme », écrit-il au début de L'Emile. Dénonçant la corruption, les inégalités et l'injustice, Rousseau a très certainement contribué à l'avènement de la Révolution française et à l'instauration théorique de « l'abolition des privilèges ». L'analyse sévère qu'il fit des institutions et des mœurs de son temps, les critiques émises à l'égard du progrès des sciences, mais aussi à l'égard de la religion le discrédite néanmoins aux yeux de certains de ses contemporains. Il se fit beaucoup d'ennemis, dont le plus célèbre fut Voltaire. Rousseau envisage d'emblée « les hommes tels qu'ils sont, et les lois telles qu'elles peuvent être ». Telle est la méthode qu'il fait sienne : il faut préalablement concevoir ce que pourrait être, en théorie, un État juste, pour créer les conditions de sa réalisation. La mise entre parenthèses des faits tels qu'ils peuvent être observés est donc nécessaire : « Commençons donc par écarter tous les faits, car ils ne touchent pas à la question », écrit-il dans le Discours sur l'origine et les de l'inégalité parmi les hommes (1755). Rousseau propose ainsi des « raisonnements hypothétiques et conditionnels », qui seront établis comme les fondements d'un nouvel ordre social.

b.  L'hypothèse fictive de l'«état de nature»

Rousseau écarte le postulat d'une « sociabilité naturelle » de l'homme, même si, d'une manière qui peut sembler paradoxale, il estime que « l'homme naît naturellement bon », contrairement à Hobbes, pour lequel l'état de nature est l'état de guerre de tous contre tous. Pour le philosophe anglais en effet, « l'homme est un loup pour l"homme », et c'est pourquoi l'homme doit sortir de cet état de nature qui le fait vivre dans une crainte, voire une terreur permanente.
Pour Rousseau, la sortie de l'état de nature n'est pas rendue nécessaire par un sentiment permanent d'insécurité, propre à cet état, mais par la nécessité pour l'homme de conquérir sa liberté. En effet, à l'état de nature, l'homme n'est pas libre, il est indépendant. Il est en quelque sorte indifférent aux autres hommes, et c'est pourquoi précisément Rousseau rejette ce postulat d'une sociabilité naturelle de l'homme. À l'état de nature, l'homme est isolé des autres hommes, et il n'a pas conscience ni du bien, ni du mal. A-moral, il ne peut donc être immoral. L'état de nature est par conséquent une sorte d'état inférieur, fût-il idéal, au sein duquel l'homme ne peut ni développer son humanité, ni se perfectionner. C'est dans un nouvel état social que l'homme pourra se réaliser, à travers une liberté effective.
Le passage de l'état de nature à l'état social permet que soient substitué « la justice à l'instinct », écrit Rousseau, et « le droit à l'appétit », autrement dit, la raison aux passions.

c. La volonté générale

Au cœur du contrat social se trouve le concept de « volonté générale », que Rousseau exprime en ces termes (Du Contrat social, Livre I, Chapitre VI) : « Chacun de nous met en commun sa personne et toute sa puissance sous la suprême direction de la volonté générale; et nous recevons encore chaque membre comme partie indivisible du tout. » C'est de cette manière que se constitue « un corps moral et collectif, composé d'autant de membres que l'assemblée a de voix. ». S'unissant à tous les individus, chacun d'entre eux participe à la fabrication d'un « moi commun » qui s'incarne en une « personne publique ». La volonté générale n'est donc pas la somme ou l'addition des volontés individuelles, mais bien ce « moi commun » qui en constitue l'essence.
L'instauration de la volonté générale participe de cette manière à l'institution de la liberté : en s'unissant à tous, en effet, l'homme « n'obéit qu'à lui-même ». Rousseau écrit encore que « l'obéissance à la loi qu'on s'est prescrite est liberté ».

2. Le traité de l'éducation : «Émile, ou De l'éducation» (1762)
a. Une éducation négative
Émile est un petit garçon élevé à la campagne, et donc soustrait à l'influence délétère de la société des hommes. Émile ne lit pas de livres : ceux-ci risqueraient non seulement de le pervertir, mais encore de lui donner une fausse idée de ce que la « culture » peut représenter. Autrement dit, Rousseau réitère à travers cette expérience fictive la maxime de Montaigne, selon laquelle il vaut mieux posséder « une tête bien faite », plutôt qu'une « tête bien pleine ». L'enseignement des Fables de La Fontaine, par exemple, demande à l'enfant un effort inutile, puisqu'il apprend par cœur des textes auquel il ne comprend rien.

Il reçoit une éducation qualifiée de « négative », dans la mesure où le pédagogue chargé de l'éducation d'Émile intervient le moins possible, et laisse s'exprimer la spontanéité de l'enfant. Celui-ci doit tout découvrir par lui-même, même si son éducateur reste omniprésent. « Il faut », estime Rousseau, « qu'Émile puisse observer la nature, et se fier aux leçons que va lui apporter le contact direct avec les choses ». La nature, pour Rousseau, est supérieure à la culture, toujours considérée par lui comme artificielle.

b. L'idée de perfectibilité

Au cœur de la pensée rousseauiste, l'idée ou la faculté de perfectibilité est également centrale dans son traité sur l'éducation. À sa naissance, l'homme n'est rien, contrairement à l'animal, qui est dès sa naissance tout ce qu'il sera toute sa vie. Rousseau peut ainsi opposer, en comparant l'homme à l'animal, l'instinct et la liberté : l'animal choisit par instinct, explique Rousseau dans le Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes, tandis que l'homme effectue certains choix « par un acte de la liberté ». L'animal ne peut s'écarter de la règle naturelle qui lui est prescrite ; l'homme peut au contraire, parce qu'il est libre, la transcender. Ceci explique d'ailleurs pourquoi l'homme peut être mauvais, méchant, ou immoral, contrairement à l'animal. De la même manière, il n'existe pas d'animal idiot. Seul l'homme peut être imbécile.
Il faut par conséquent éviter à Émile de devenir méchant ou stupide. Seule une éducation adéquate pourra faire de lui un individu accompli.

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