Étude de cas : L'immigration et la société française au 20e siècle
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Pour répondre à ces besoins, les entrepreneurs s'appuient sur des centres de recrutement comme la SGI, la Société générale d'immigration. Mais à partir de 1914, c'est avant tout l'État qui va se charger du recrutement de la main d'œuvre étrangère. En 1931, avec près de trois millions d'étrangers, on atteint une population qui ne sera jamais dépassée ensuite (en rapport avec le chiffre de la population totale). Ces étrangers représentent alors 7 % de la population totale.
La période de forte croissance des Trente Glorieuses après la Seconde Guerre mondiale explique également l'amorce d'un nouveau cycle d'arrivées. Les besoins en main d'œuvre font grimper le nombre d'arrivées à 3,4 millions en 1975.
Les raisons de l'immigration sont aussi politiques. La France représente dans l'héritage de la Révolution une terre d'asile pour les populations victimes de dictatures. Les exilés politiques sont des Arméniens ayant échappé au génocide turc en 1915, des Italiens antifascistes, des Allemands fuyant le nazisme. Dans le contexte de guerre froide, à partir de 1947, la France reçoit aussi des exilés venant des pays communistes.
Les années 1960 constituent un tournant important car dès lors les sources du recrutement se diversifient. L'origine européenne des flux demeure, comme celle des pays méditerranéens tels l'Espagne et le Portugal en particulier. Cependant l'immigration en provenance du Maghreb explose. Celle-ci s'est accélérée avec la décolonisation et les liens privilégiés qui se nouent entre les anciennes colonies et l'ex-métropole. Les Marocains, les Tunisiens arrivent plus massivement, de même que les Algériens après la fin de la guerre (1954-1962). À partir du milieu des années 1960, c'est une immigration en provenance d'Afrique sub-saharienne qui débute mais elle reste faible sur cette période.
Doc. Émigration espagnole en Europe : des familles espagnoles s’apprêtant à partir vers la France |
La crise économique vécue à partir des années 30 oblige l'État à limiter les arrivées : la loi de 1932 met en place un contingent par profession. En 1934, la possibilité de renouveler les cartes d'identité est restreinte, ce qui rend difficile l'accès au travail. La clandestinité est également sévèrement réprimée. Le milieu des années 1930 est marqué par un retour de la xénophobie, la haine de l'étranger. On compte en 1936 20 % d'étrangers en moins sur le territoire national.
Durant la guerre, l'occupation a pour effet de stopper les flux d'immigration. Le régime de Vichy s'engage dans une politique de repli sur le territoire : l'étranger, à partir de la loi du 27 septembre 1940 est soumis à une stricte surveillance. Il n'a plus le droit à la libre circulation sur le territoire et ne bénéficie pas de la législation du travail. La loi du 4 octobre 1940 vise enfin les « ressortissants étrangers de race juive ». Cette loi antisémite permet de les interner dans des camps spéciaux par décision du préfet.
Le septennat de Valéry Giscard d’Estaing (1974-1981) marque un contrôle plus systématique des entrées sur le territoire et des séjours. Les retours volontaires dans les pays d’origine sont par ailleurs encouragés. En 1977, une prime de retour de 10 000 francs est accordée : « le million Stoléru » du nom du secrétaire d’État auprès du Ministre du travail. Seuls les étrangers concernés par le regroupement familial et les réfugiés politiques sont autorisés à s’installer.
Désormais, la crise et le développement du chômage ne permettent plus le recours à une immigration de masse. Cependant, le vieillissement de la population conjuguée avec les besoins en main d’œuvre de certains secteurs (bâtiments, travaux publics ou hôtellerie) poussent les pouvoirs publics à recourir à une immigration contrôlée.
Les années 1980 et le premier septennat de François Mitterrand marquent le retour à un assouplissement législatif. En 1982, le nombre d’étrangers atteint 3,6 millions de personnes.
Cependant cet assouplissement cède le pas à partir des années 90 à une série de lois plus restrictives. Celles-ci illustrent également le rapport difficile que le pays entretient désormais avec l’immigration. En 1993, le code de la nationalité est voté : les enfants nés en France de parents étrangers doivent faire la demande de naturalisation entre 16 et 21 ans.
L’Asie contribue également à l’élargissement du cadre géographique. Elle représente le seul continent dont le pourcentage d’étrangers continue à augmenter après 1990. Plus d’une centaine de nationalités sont désormais présentes sur le territoire, mais le pourcentage d’étrangers est toujours resté inférieur à celui de 1982.
Elles s’illustrent par les problèmes d’accès au logement. Durant les Trente Glorieuses, les populations étrangères se sont souvent logées en périphéries des villes, dans les banlieues aux collectifs qui présentaient encore une mixité sociale. La crise empêche ces populations d’accéder à la propriété et d’acheter un pavillon individuel hors de ces quartiers. Une ghettoïsation de certaines banlieues se développe dans les années 1980.
L’illustration des problèmes d’intégration apparaît aussi avec les difficultés pour ces populations à bénéficier d'une ascension sociale. La part des jeunes immigrés ou nés de parents immigrés sortant du système éducatif sans diplôme est de 31 % aujourd’hui contre 14 % pour des jeunes nés de parents d’origine française. Ceux qui accèdent à un diplôme bac+2 ou +3 sont presque 2 fois moins nombreux.
La fin des Trente Glorieuses modifie cette donne. La politique d'ouverture devient plus restrictive, sans tarir complétement une immigration dont les sources se diversifient. Cependant l'intégration, dans ce contexte difficile, demeure inachevée.
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