La raréfaction, à l’échelle
mondiale, des énergies fossiles combinées au
réchauffement climatique qui facilite désormais
la navigation font de l’Arctique un espace très
convoité pour ses nombreuses ressources. Cependant, la
richesse du sous-sol du pôle Nord provoque logiquement
des tensions entre les États riverains qui cherchent
à s’approprier ce formidable potentiel.
1. Des ressources de plus en plus convoitées
a. Pourquoi cet intérêt marqué
pour l'Arctique aujourd'hui ?
L’Arctique est un espace géographique qui
suscite un intérêt croissant dans
l’arène politique mondiale. Certains
facteurs expliquent aujourd’hui cet
intérêt nouveau. La disparition progressive
de la glace de mer en été, résultant
du réchauffement climatique, ouvre de nouvelles
voies de circulation maritime (voir fiche Un
milieu contraignant, un nouvel espace en voie
d’intégration). Cette ouverture,
conjuguée avec l’amélioration des
moyens de communication et de transports, rendent
l’espace plus accessible.
Par ailleurs, la pénurie mondiale de ressources
naturelles aggravée par l’augmentation de la
demande des pays émergents nécessite de
trouver et d’exploiter de nouveaux gisements. Les
progrès technologiques accomplis dans le domaine
de l’extraction des ressources permettent
aujourd’hui d’accéder aux
ressources présentes en Arctique.
b. Quelles disponibilités en ressources ?
L’exploitation des ressources en Arctique est
ancienne : les Basques venaient chasser la baleine en
mer de Barents et les Nord-Américains ont
exploité le pétrole dans le Yukon et en
Alaska dès les années 1920. Cette
exploitation se poursuit aujourd’hui et beaucoup de
pays sont concernés : les Norvégiens
exploitent le gaz dans le gisement off-shore de
SnøHvit. Le parc arctique de la Russie
représente déjà 12 % du PIB
national, 80 % du gaz et 60 % du pétrole du pays.
Les Canadiens, dont 40 % de la surface du pays est en
zone arctique, disposent et exploitent de nombreuses
richesses.
Mais ces nouvelles potentialités attisent la
convoitise de tous. Ainsi au nord du continent
américain, un tiers du potentiel en hydrocarbures
est encore inexploité. La course pour
l’accès à ces ressources est donc
lancée et chacun cherche à gagner de
nouveaux territoires. D’après une estimation
d’une agence gouvernementale américaine en
recherche géologique datée de 2008,
l’Arctique recèlerait 22 % des ressources
énergétiques non découvertes
mais techniquement exploitables de la planète. Il
rassemble à lui seul 13 % des réserves
mondiales inexploitées en pétrole et 30 %
pour le gaz. À ces ressources
énergétiques, il convient d’ajouter
les possibles gisements en minerais
précieux. Ainsi le sous-sol de
l’Arctique recèlerait également des
réserves en cuivre, en nickel et en or.
2. De nombreuses tensions entre États
a. Pourquoi des tensions ? Un espace sous
contrôle
Huit nations possèdent des territoires en
Arctique. En effet, en plus du Canada, sept autres
pays disposent d’une souveraineté sur des
espaces s’étendent au-delà du
66e parallèle : la Norvège, la
Suède, la Finlande, la Russie, les
États-Unis avec l’Alaska, le Danemark avec
le Groenland et l’Islande. On estime que 4
millions de personnes habitent au nord du cercle
polaire. Entre ces pays, les tensions
s’exacerbent pour des objectifs bien précis
: il s’agit tout d’abord de
s’approprier des territoires pour, en
conséquence, contrôler les zones de
pêche, d’exploitation de ressources
énergétiques ou encore d’assurer le
contrôle sur des routes commerciales.
b. Assurer sa souveraineté sur les
territoires
Depuis 1982 et la convention de Montego Bay en
Jamaïque, les États côtiers peuvent
revendiquer des droits sur les ressources du sol et du
sous-sol de la haute mer s’ils parviennent à
démontrer qu’il existe un prolongement de
leur masse terrestre sous la mer en delà des 370
km de la ZEE (Zone Économique Exclusive).
Celle-ci marque la limite du domaine maritime d’un
État côtier. Au-delà des 370 km, on
entre dans la haute mer où prévaut
la liberté de navigation. Les États
côtiers n’y ont plus autorité. Il est
donc dans l’intérêt de chaque
État de démontrer que sa
souveraineté peut s’étendre
au-delà de la ZEE. Cependant, la convention fixe
une limite : l’extension ne peut dépasser
680 km. Depuis 2009, à la faveur de la
compétition pour l’accès aux
ressources minières et énergétiques,
les demandes d’extension des limites du plateau
continental ne cessent d’augmenter devant la
commission chargée de la question aux Nations
unies. Cette commission cherche à concilier les
États et vérifie rigoureusement le
bien-fondé des demandes. Aussi, certains pays
lancent des programmes et des expéditions
scientifiques afin de convaincre que les espaces
convoités se rattachent à leur plateau
continental.
3. Quels sont précisément les enjeux ?
a. Contrôler l'accès aux ressources
La Russie a été la première à
manifester très clairement ses ambitions. Depuis
2008, le pays a annoncé vouloir faire de sa
région polaire une base stratégique pour
assurer ses besoins en hydrocarbures, en ressources
biologiques, en minerais et en eau. Ses scientifiques
sont sollicités pour déterminer les limites
du territoire que le pays pourra revendiquer. Canadiens
et Américains dépêchent aussi sur
place leurs scientifiques. Au printemps 2009, les
Canadiens ont ainsi pu publier le premier atlas
géologique de l’Arctique qui
répertorie l’emplacement des gisements
d’hydrocarbures et de minerais précieux.
b. Contrôler les zones de pêche
La fonte des glaces facilitant la navigation, de nombreux
bateaux de pêche commencent à
s’aventurer dans les eaux arctiques. Ce
phénomène s’accentuera dans les
années à venir. C’est pourquoi un
pays comme le Canada cherche à affirmer sa
souveraineté sur les eaux de l’archipel et
à se doter de moyens d’y exercer un meilleur
contrôle. Il pourra surveiller les activités
de pêche suspectes et intervenir en cas de
problème. Cet enjeu est d’autant plus
crucial que l’océan Arctique est riche en
ressources halieutiques (les ressources vivantes
de la mer).
c. Contrôler les routes commerciales
L’objet des tensions est surtout le passage du
Nord-Ouest. Le Canada considère que ce passage se
trouve sous son entière souveraineté tandis
que les États-Unis et l’Union
Européenne estiment qu’il doit être
classé comme un couloir de navigation
international. Tout navire, quelque soit son pavillon
doit pouvoir y circuler. Le Canada s’obstine
à contester ce point de vue et, en 2009, a
même symboliquement rebaptisé cette route le
« passage canadien du Nord-Ouest
».
L'essentiel
La richesse du milieu arctique, en ressources
énergétiques, en minerais ou en ressources
halieutiques, attise la convoitise des États
riverains. Ils s’efforcent d’étendre leur
souveraineté sur ces espaces. Cette compétition
attise les tensions et fragilise les équilibres du
milieu.
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